L’avenir du e-commerce s’écrit avec un m, qui veut dire mobile. Mais quelle est la bonne stratégie pour capter les mobinautes : application, site mobile, ou les deux ?
Eldorado annoncé pour les e-commerçants, la vente via smartphone n’a pas encore totalement décollé en France. Mais ça ne devrait pas durer: ce n’est plus sur ordinateur que les Français passent l’essentiel de leur temps online. Et aux Etats-Unis, ce sont même les applications mobiles qui se taillent désormais la part du lion. Comment les cyber-marchands doivent-ils s’adapter à cette nouvelle donne? L’éclairage de Renaud Menerat, président de l’agence de création d’interfaces mobiles UserADgents et de la Mobile Marketing Association France.
Quelle est l’importance du m-commerce en France?
La croissance de l’e-commerce, désormais, est principalement tirée par le m-commerce. Selon les statistiques officielles, le commerce mobile représentait 10% du e-commerce en 2015. Pour 2016, j’estime qu’on en est déjà à 25%! Sur mobile, la croissance du chiffre d’affaires est de 40% par ans, contre 10 à 15% dans les meilleurs des cas pour l’e-commerce au global. Donc la tendance est claire: c’est sur le m-commerce que les marchands vont trouver leur relais de croissance, et donc concentrer leurs investissements.
D’autant qu’il y a encore un gros décalage entre l’audience du mobile et les achats que l’ont fait avec…
Effectivement. Un chiffre, publié par Médiamétrie fin 2015, a créé un petit électrochoc: plus d’une visite sur deux se fait désormais sur smartphone ou tablette.L’ordinateur est donc minoritaire en audience, mais pas encore pour ce qui est des ventes online.
Comment expliquer cet écart?
D’abord par le fait que les marchands ont mis du temps à penser mobile. Il y a un an, un tiers des acteurs français seulement avaient développé une version de leur site adaptée aux smartphones. La navigation, les systèmes de paiement, le poids des images n’étaient pas optimisés, donc la performance commerciale sur mobile était moindre.
L’autre explication, c’est qu’un smartphone n’est pas simplement un canal de vente. Comme le consommateur l’a sur lui partout et tout le temps, il influence le commerce physique comme jamais l’ordinateur n’a pu le faire. Mais c’est plus compliqué à mesurer…
Pour un e-commerçant, par quoi faut-il commencer pour se convertir au mobile?
App ou site mobile pour toucher les consommateurs, c’est bien sûr la grande question. A mon sens, un site optimisé, c’est aujourd’hui une obligation. Un marchand qui ne le fait pas va perdre des ventes, mais en plus perdre en trafic puisque Google a clairement indiqué qu’il allait favoriser les sites adaptés à la consultation mobile.
Un site optimisé pour mobile, qu’est-ce que ça implique concrètement?
Schématiquement, vous avez deux options: soit rebâtir votre site Web en « responsive design », une technologie qui adapte automatiquement la disposition du site à l’écran sur lequel il est consulté ; soit développer une version du site à part, exclusivement dédiée au smartphone. Lorsque l’internaute se connecte, on est capable de détecter l’appareil qu’il utilise et le renvoyer sur la version adaptée. Le sens de l’histoire, ce serait plutôt la première option: un site unique, c’est un peu plus cher à développer, mais beaucoup moins à maintenir. Mais pour des raisons historiques ou techniques, certains seront tentés de choisir la seconde solution.
Les applications mobiles sont-elles plus performantes?
En la matière, il n’y a aucune règle. Si vous comparez les performances des applications et des sites mobiles des meilleurs e-commerçants américains, les résultats vont varier du tout au tout d’un marchand à l’autre.
Dans quel cas alors s’orienter vers le développement d’une application?
L’application a beaucoup d’avantages: le client rentre ses données une fois pour toutes, la navigation y est fluide… Mais elle demande un petit effort au consommateur (il faut la télécharger), elle engendre des coûts de développement pas anodins… Donc elle n’a d’intérêt que s’il la fréquente régulièrement. Si l’objectif est d’acquérir de nouveaux clients, ou d’interagir avec des clients ponctuels, l’application n’est pas la bonne solution.
Si vous ne vendez pas des voitures ou des canapés, mais des produits qu’on achète régulièrement (vêtements, alimentation…), si vous devez vous adresser à des clients réguliers ou VIP, l’application devient intéressante. Idem si votre activité a un caractère d’urgence (les ventes privées par exemple). Et si vous pensez à développer des services annexes (carte de fidélité, possibilité de scanner des produits en magasin, par exemple), l’application devient incontournable. Mais il faut qu’elle propose quelque chose de plus qu’un site.