DÉVELOPPEMENT – Bien que le Maroc affiche des potentiels de progrès prometteurs au sein d’un climat des affaires plutôt favorable, de nombreux défis majeurs restent à relever. Croissance économique, développement social, éducation mais aussi problématiques environnementales sont autant de challenges à surmonter afin d’assurer une transition complète vers un pays « émergent ».
Avec seulement 1.3% de croissance prévue en 2016 contre quasiment le double en 2015, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) se montre pessimiste en terme de performances économiques et ses prévisions contrastent avec celles du FMI qui table plutôt sur une croissance de 5% pour le royaume à la fin de l’année.
Des efforts colossaux à déployer
L’une des raisons principales qui expliquent ce ralentissement est le secteur primaire qui affiche des variations de production négatives dues à un sérieux déficit pluviométrique accentué par une mauvaise répartition spatio-temporelle. De plus, un des moteurs de la croissance durant ces 10 dernières années, le secteur touristique, affiche également un essoufflement de sa valeur ajoutée dans un contexte marqué par une désaffection croissante des touristes du Vieux continent, notamment français, à cause des récents attentats en Europe.
Au rebours, la situation de l’économie marocaine à long terme demeure bien plus préoccupante que la morosité de l’an 2016. Des réformes structurelles de fond sont nécessaires afin d’engager le pays dans une procédure de diversification de sa production et de diminuer sa dépendance à des facteurs difficilement maîtrisables tels que la pluviométrie ou l’attractivité touristique. La stratégie adoptée dès les années 2000 d’attirer les industriels étrangers se révèle être payante et contribue à améliorer la robustesse de l’économie du royaume.
D’un point de vue du développement social et humain, des efforts colossaux restent à déployer par le Maroc qui pointe au 126ème rang du classement mondial de l’IDH 2015. Depuis 2010, le pays stagne au sein de la catégorie « IDH moyen » et peine à passer le cap des 0.8, synonyme d »IDH élevé ». En effet, le royaume est à la traîne en demeurant en-dessous de la moyenne mondiale et se voit même dépassé par ses voisins algériens et tunisiens respectivement 83ème et 96ème. Seule l’espérance de vie de 74 ans, en hausse de 3 ans par rapport à 2014, constitue l’un des rares points positifs.
Niveau d’éducation médiocre
Plus en détail, le niveau d’éducation médiocre est alarmant: en cause, une jeunesse marocaine qui quitte l’école prématurément avec une durée moyenne de scolarisation qui frôle à peine les 4.4 années tandis qu’elle tourne autour de 12 au sein des pays de l’OCDE. A cela il faut ajouter qu’un tiers de la population du royaume vit en situation de pauvreté avec des emplois précaires et des revenus faibles.
En soutenant les activités génératrices de revenus, en facilitant les conditions d’accès aux services et infrastructures de base et en soutenant les populations les plus vulnérables, le programme de l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) fait foi de la dynamique louable du Maroc en faveur du développement humain en harmonie avec les « Objectifs du Millénaire » fixés par l’ONU.
Mais il en faut plus: le PNUD tire la sonnette d’alarme et préconise des actions plus palpables et ciblées qui doivent concilier la création d’opportunités d’emplois concrètes avec une assurance du bien-être des travailleurs en leur garantissant des droits et en améliorant leur couverture sociale.
Par ailleurs, le système éducatif au Maroc est confronté à des obstacles de taille qui requièrent une forte volonté politique pour être surmontés. En effet, la couverture du territoire par les services d’éducation demeure faible, le taux d’abandon et d’échec est anormalement élevé et les infrastructures sont inadaptées. De plus, l’absentéisme des professeurs combiné à leur qualification inadéquate accentuent les effets néfastes qu’a eu la politique d’arabisation lancée par le ministre de l’éducation Azzedine Laraki au début des années 1980.
La constante augmentation du nombre d’élèves inscrits dans les établissements privés et les missions étrangères confirme la méfiance des Marocains vis-à-vis de leur système d’éducation. Les décisions prises par l’Etat ces dernières années d’actualiser les programmes pédagogiques et de créer des centres de formation des enseignants à l’échelle régionale n’ont eu que très peu d’effets.
Fin 2015, l’annonce par le ministre de l’éducation Rachid Belmokhtar de l’enterrement du programme d’arabisation au profit d’un retour au français met en exergue le doute et l’incohérence qui planent sur la stratégie du royaume. Les instances internationales, notamment la Banque mondiale, pressent le Maroc de mettre en œuvre des réformes de fond du système d’éducation qui entrave le développement du pays.
Urgence environnementale
Finalement, la question environnementale, d’habitude mise à l’écart, est aujourd’hui au-devant de la scène notamment à cause de la COP22 qui se tiendra à Marrakech en novembre prochain. Il faut dire que la dégradation de l’environnement est estimée à des milliards de dirhams chaque année et constitue une perte irrémédiable pour les générations à venir.
L’urgent pour le royaume réside non seulement dans le traitement de problématiques environnementales classiques mais également la préservation de ses ressources naturelles sur le long terme. 6 millions de tonnes de déchets sont produites annuellement et leur mauvaise gestion est responsable de la pollution de l’air, de l’atmosphère, des littoraux, de la contamination des sols mais aussi de la détérioration de la qualité de vie en milieux urbain et rural.
L’éradication des décharges sauvages et un meilleur encadrement des collectes sont de mises afin de surmonter ce défi. Parallèlement à cela, l’eau est devenue une ressource plus rare et plus chère et son accès est problématique presque partout au Maroc. Dans un futur proche, le pays est menacé par une pénurie hydrique aux conséquences catastrophiques si les bonnes décisions ne sont pas prises.
La promotion des techniques d’irrigation dans le cadre du plan Maroc Vert a permis d’économiser d’énormes quantités d’eau dans le secteur primaire, premier consommateur de la ressource en eau du Maroc à hauteur de 80%.
De surcroît, les menaces sur la biodiversité sont omniprésentes: le patrimoine forestier est annuellement fragilisé par la coupe de bois illicite, la désertification, le défrichement et les incendies. En grande partie liée à des facteurs socio-économiques et géopolitiques, la surexploitation des richesses halieutiques prive les générations futures de ressources précieuses et aucun débat sérieux n’a été ouvert ces dernières années pour mieux encadrer l’octroi des contrats de pêche.
Les campagnes de sensibilisation au respect des milieux naturels ont certes ouvert les yeux des Marocains sur leur patrimoine écologique d’exception, mais seule une volonté forte de l’Etat alliée à des financements solides parviendra peut-être à dessiner les contours d’un avenir meilleur.